Témoignage de Danielle Steel, la maman de Nick Traina, un ado maniaco-dépressif.
Extrait du livre “Un rayon de lumière” Danielle Steel – Ed Presse de la cité – 1998

Nick Traina, est un enfant différent, sa mère l’a toujours senti. Elle nous décrit dans son livre, ses doutes, son parcours, la lutte contre les dépressions très fortes qui menèrent Nick à se suicider à l’age de 19 ans. Ci-dessous quelques extrait du livre :

[…] S’il m’était permis de formuler trois vœux, le premier serait qu’il n’ait jamais eut de maladie mentale, le deuxième qu’il soit encore en vie et le troisième que quelqu’un m’ait prévenue, à un moment donné, que les troubles dont il souffrait – la psychose maniaco-dépressive – pouvaient le tuer. […]

[…] Car les meilleures leçons que j’ai retenues s’appellent courage, amour, énergie, stratégie, persévérance. Nous n’avons jamais baissé les bras, nous ne nous sommes jamais détournés de lui, nous ne l’avons jamais abandonné jusqu’à ce que ce soit lui qui nous abandonne, parce que la bataille était trop longue, trop douloureuse.[…]

[…] Nous l’avons accepté tel qu’il était, en l’aimant tendrement, inconditionnellement. A nos yeux sa maladie n’était qu’une facette de sa personnalité, pas toute sa personnalité.
Accompagner quelqu’un atteint de psychose maniaco-dépressive vous engage dans un long chemin semé d’épines. On ne peut pas le nier. Par moments, on a envie de hurler; il y a des jours où on en peut plus, des jours où l’on souhaite que ça s’arrête. Après tout, c’est son problème, pas le nôtre. Sauf que cela devient très vite notre problème… On n’a pas le choix. On doit se tenir constamment près de lui. On est pris au piège aussi sûrement que le malade lui-même. Un piège qu’on en vient à détester de toutes ses forces, qui empoisonne notre vie, qui ronge votre propre santé mentale. Mais quoi qu’il arrive, on est là, et il faut l’accepter.[…]

[…] Nick tentait par tous les moyens de m’imposer ses choix.[…] Il me lança un ultimatum. Il venait d’avoir un an et refusait de dormir[…] Une seule chose m’inquiétait alors. Il ne dormait jamais… pas assez en tout cas. Il n’avait pas encore deux ans quand j’ai abandonné l’idée de lui faire faire la sieste.[…] Certains traitements contre le rhume qui auraient dû le plonger dans un état quasi commateux le rendaient complètement “speed”.[…]
[…] Si cela peut paraître normal à douze, quatorze ou quinze ans, peut-être même à sept, il était parfaitement ridicule de se disputer avec un mouflet de dix-huit mois à propos d’une barboteuse en velours bleu pâle. Car lorsqu’il lançait son fameux avertissement “je ne mettrai jamais ça”, il ne revenait jamais sur sa décision.[…] Il réservait ses sautes d’humeur, sa violence et ses colères aux personnes qui vivaient avec lui.[…]

[…] J’ai su soudain, avec une clairvoyance absolue, que mon fils était très perturbé, même s’il paraissait normal aux yeux des autres et, parfois, aux miens. Oui du trèfonds de mon âme, je voyais la fêlure. J’ai eu peur. Je n’avais pas la moindre idée de la façon de l’aider, d’améliorer son état. Mes efforts auprès de son pédiatre et de ses instituteurs avaient été vains. Ils ne voyaient pas où était le problème. […]
Tout ce que je savais, c’était que Nicky avait des problèmes. Et que je n’étais jamais tranquille. Sans relâche, mon “sonar” personnel m’avertissait que mon fils était en porte-à-faux. […]
[…] Chaque fois que je suggérais que, peut-être, quelque chose n’allait pas, on me regardait comme si j’étais folle […] Sauf qu’ils ne vivaient pas avec lui. Ils ne voyaient pas les objets qu’il cassait. Ils n’assistaient pas à ses crises de rage, qui avaient empiré. Ils n’étaient pas confrontés à ses attitudes obsessionnelles.[…]

[…] A partir de la classe de cinquième commença la longue et douloureuse descente de Nick dans une spirale irréversible. Pour la première fois, il se mit à se faire remarquer à l’école. Et, croyez-moi, cette fois-ci on le remarqua. L’enfant sur lequel je n’avais cessé d’attirer l’attention sept an durant, depuis l’école élémentaire et même depuis la maternelle, le petit surdoué donc j’avais, de temps à autre osé dire qu’il n’était peut-être pas tout à fait “normal” mais qu’ils trouvaient merveilleux, devint soudain un véritable fléau. Je recevais régulièrement des appels téléphoniques de la direction. Je developpai à partir de ce moment un nouveau talent, que je n’ai cessé de perfectionner pendant les années suivantes de sa scolarité. L’aptitude à m’aplatir. Je l’ai ajoutée au palmarès des exploits et des vertus de la bonne mère. Il fallait tout tenter pour que Nick ne soit pas renvoyé. Nous espérions qu’il allait changer. Mais les coup de fils se multipliaient. Il insultait ses camarades, choquait ses professeurs par son insolence. Il négligeait ses devoirs et s’accordait des libertés que les enseignants jugeaient extrêmement déplaisante. Soudain Nick n’était plus conforme, ne cadrait plus avec l’ensemble.[…]

[…] Elle (NDLR : une psychologue accompagnante) faisait figure de médiateur entre des belligérants. Parfois, elle négociait de petits détails avec lui : prendre une douche, mettre des chaussures. Et parfois aussi, elle l’aidait à résoudre des questions plus importantes.
Comme tous les parents qui doivent faire face à de telles difficultés, John et moi avions des points de vue divergeant sur la question. L’angoisse d’affronter Nick minute après minute, jour après jour, soumettait notre couple à une terrible pression.[…] Le comportement de Nick était devenu trop stressant pour toute la famille […] A cette époque, vivre siys ke même toit que Nick relevait du cauchemar. John et moi étions inquiets pour un tas de choses. Son bien-être physique, sa scolarité, son attitude à la maison[…] Mon attention s’étant entièrement focalisée sur Nick[…]

[…]Le pire c’était que je ne savais plus quoi faire. La patience, le raisonnement n’avaient plus aucune prise sur Nick, pas plus que les menaces et les conséquences de ses actes. Rien ne semblait l’impressionner. Nous avons tout tenté. Etablir avec lui des contrats, par exemple, dont il discutait âprement chaque clause, des heures durant, avant de signer finalement, pour rompre ses promesses quelques minutes ou quelques heures après.[…]

NDLR : Nick jusque là n’avait aucun traitement.

[…] Ce printemps là nous prîmes une importante décision dans le but de protéger notre santé mentale, cette fois. C’était mon idée et je la soumis à Nick. Il allait de ka paix de notre esprit. De notre tranquillité. De la manière de rendre vivable sa maladie. A la longue, non seulement Nick s’y adapta, mais il s’en déclara enchanté. Nous décidâmes d’embaucher des aides pour lui. Des sortes de surveillants.[…] Confier Nick à une aide me facilitait la vie. Le savoir en sécurité combattait efficacement mon stress, mes inquietudes à son sujet.[…]

NDLR : traitement : Anti-dépresseur uniquement.

Danielle Steel

http://www.pressesdelacite.com/site/un_rayon_de_lumiere_&100&9782258050587.html

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